Cellou Dalein Diallo a été investi dimanche 06 septembre, candidat à l’élection présidentielle du 18 octobre prochain. Face à ses militants et responsables du Parti, réunis à leur siège, le président de l’UFDG a aussitôt tenu son discours qui a tout l’air martial.
Mesdames et Messieurs les Membres du Bureau Exécutif ;
Mesdames et Messieurs les Membres du Conseil National des Sages ;
Mesdames les Membres du Comité National des Femmes ;
Mesdames et Messieurs les Membres du Comité National des Jeunes ;
Mesdames et Messieurs les Invités ;
En ce moment crucial de la vie de notre pays, à travers vous, c’est à toute la Nation guinéenne que je m’adresse. La décision que je prends ce matin, dont l’histoire sera témoin, est lourde de conséquences pour chaque guinéenne et pour chaque guinéen. Elle n’implique pas que notre Parti, elle est si essentielle qu’on sait qu’elle affectera le cours de notre destin à tous.
J’ai entendu vos cris de cœur. Je mesure à sa juste valeur la gravité de la situation sociopolitique de notre cher pays. Je mesure également le poids de l’immense responsabilité qui pèse sur mes épaules en ces temps d’incertitudes, d’inquiétudes, voire même de solitude.
Je sais vos attentes. Je connais vos appréhensions. Je sens en moi chacune de vos interrogations, puisqu’elles ont résonné chaque jour dans le tréfonds de mon âme, ces dernières semaines. Vos craintes sont justifiées. Elles sont légitimes. Lorsqu’on a affaire à un président roublard et sans scrupules, chacune de nos actions doit être questionnée avec intelligence, posée avec pertinence.
Chers compatriotes,
Mon choix de diriger un parti politique procède d’une conviction inébranlable : pour accéder au pouvoir, il faut participer à des élections. J’ai fait le choix de conquérir le pouvoir par le biais de la confiance du peuple, qui s’exprime librement par le suffrage universel. Je suis un républicain convaincu, attaché aux valeurs universelles de démocratie. Je suis par ailleurs un homme préoccupé par la paix et la cohésion sociale dans notre pays. C’est au nom de ces principes qu’en 2010, lorsque ma victoire à l’élection présidentielle m’a été volé, je me suis abstenu de toute réaction qui aurait pu déboucher sur une guerre civile compte tenu du contexte qui prévalait.
Au nom de ces principes et de ces valeurs, j’ai été écrasé par un profond dilemme : celui d’aller à cette élection présidentielle ou pas. Alors, ces derniers jours, j’ai posé beaucoup de questions et j’ai beaucoup écouté. J’ai écouté parce que j’avais besoin d’entendre la lumière de la sagesse de chacun pour éclairer mon chemin. J’ai écouté parce que j’ai l’intime conviction que chacune de mes décisions doit être le fruit d’une concertation nourrie de contradictions, d’interrogations, d’oppositions, afin que chaque voix pèse de tout son poids dans la décision.
Le choix de participer à une élection alors que la transparence et l’équité du scrutin ne sont pas garanties n’est pas facile à faire. La complexité de ce questionnement a hanté mes nuits traversées d’insomnies, mes journées chargées d’interminables rencontres avec des interlocuteurs issus de toutes les catégories socio-professionnelles. Fort de tous ces échanges, de tous ces avis, c’est maintenant à moi, en tant que président du Parti, qu’il est revenu de clôturer ces débats, en toute responsabilité.
La décision prise en concertation avec mes proches collaborateurs d’engager l’UFDG dans cette compétition repose sur les avis motivés de l’écrasante majorité de nos Fédérations de l’intérieur et de l’extérieur ainsi que du libre choix des membres du Bureau Exécutif National.
Mesdames et Messieurs les membres du Conseil National,
Maintenant, vous me faites l’honneur de me demander de représenter notre Parti à cette élection.
Ai-je vraiment le choix, lorsque les militants et responsables de notre Parti, dans leur quasi- unanimité, me le demandent ?
Ai-je vraiment le choix quand on sait que les Guinéens, dans leur écrasante majorité, me font confiance, et fondent en ma modeste personne tout leur espoir, toutes leurs espérances, comme ultime rempart face au pouvoir despotique et clanique d’Alpha Condé ?
Ai-je vraiment le choix, le choix de renoncer face à une horde sans foi, ni loi qui a décidé de confisquer le pouvoir, de diviser notre pays et de piller nos ressources ? Ai-je vraiment le choix quand on est face à un adversaire obsédé par le pouvoir, qui ne se préoccupe ni de nos routes, ni de nos hôpitaux, ni de nos écoles ?
Ai-je vraiment le choix quand on est face à un pouvoir qui n’a aucun égard pour les droits humains, les règles et les principes de l’État de droit et de la démocratie.
J’ai encore, frais dans l’esprit et chaud dans le cœur, la mémoire de tous ces jeunes martyrs, tombés tragiquement sous les balles assassines de ce régime sanguinaire. Que leurs âmes reposent en paix ! Que Dieu nous donne la force et le courage de poursuivre leur combat jusqu’à la victoire finale !
Mes chers compatriotes,
Le sacrifice de ces jeunes concitoyens appelle à la résistance. Leur sang engage à la détermination. Leurs âmes cueillies à la fleur de l’âge ou au zénith de leur vie réclament la liberté et la prospérité au bénéficie du peuple de Guinée pour lequel elles sont tombées. Non, ce n’est pas en allant aux élections qu’ils nous condamneront. Nous n’avons pas le droit de nous résigner ou encore nous apitoyer sur notre sort, et se laisser prendre dans la houle d’une quelconque culpabilité qui nous fera perdre de vue l’essentiel. Le coupable, ce n’est pas nous, c’est Alpha Condé. C’est lui qui a armé sa milice et jeté cette horde sauvage aux trousses de nos combattants. En ce qui nous concerne, nous avons l’obligation de nous dresser devant Alpha Condé, sans concession aucune, pour honorer les corps de nos martyrs tombés sur le chemin de la liberté.
Mes chers compatriotes,
En ce jour, je me tiens devant vous par ma conviction inébranlable que notre combat doit continuer. Je me tiens devant vous par la force de votre confiance permanente en moi et au nom du serment de la construction d’une Guinée que je vais unir et servir.
Mais, il ne faut pas se leurrer. Avec une Constitution falsifiée, dont l’application est partiellement suspendue, un Fichier électoral tronqué et taillé sur mesure, une CENI et une Cour constitutionnelle totalement inféodées à Alpha Condé, la tâche sera ardue. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faut céder aux forces de l’abandon. La Guinée est aujourd’hui dans une situation de non droit. Il faut obligatoirement corriger cela par un retour rapide à un ordre constitutionnel normal. Nous le ferons ensemble.
C’est donc dans la foi de cet exaltant projet commun, celui de libérer notre pays de la dictature, que j’accepte votre décision de m’investir comme candidat de l’UFDG à l’élection présidentielle du 18 octobre 2020.
Ensemble, nous rétablirons la souveraineté du peuple, une souveraineté aujourd’hui travestie et détournée. La dictature n’est pas une fatalité. L’alternance démocratique est possible. Elle est à notre portée. Pour garantir cette volonté de changement, nous devons nous engager dès maintenant à nous battre. Se battre pour gagner. Se battre pour conserver notre victoire. Se battre pour vivre dignement sur cette belle terre de Guinée que nos ancêtres nous ont léguée.
Oui, si Alpha Condé ne reconnait pas sa défaite dans les urnes, nous saurons la lui démontrer dans la rue, sans coup férir. Et nous prenons déjà à témoin la communauté internationale qu’il est hors de question cette fois-ci que notre victoire soit confisquée. Il est temps qu’elle interpelle Alpha Condé, qu’elle lui rappelle les règles élémentaires de la démocratie. Si c’est entre nos mains qu’elle abandonne cette mission, alors Alpha Condé assumera toutes les conséquences de son entêtement et de sa kleptomanie électorale.
Nous lui donnons rendez-vous le 18 octobre. Nous lui montrerons que notre volonté de changement et d’alternance ne se négociera plus. 2020 n’est pas 2010, encore moins 2015. Nous sommes prêts. Nous gagnerons. Qu’Alpha Condé se le tienne pour dit. Cela est écrit. Cela sera accompli.
J’accepte donc votre mandat de représenter notre Parti à l’élection présidentielle à condition que vous vous engagez résolument et dès maintenant à voter et à sécuriser les suffrages que les guinéens ne manqueront pas de nous accorder, et de vous battre pour refuser, quoi qu’il arrive, que notre victoire nous soit volée comme ce fut souvent le cas.
En acceptant de participer à cette élection, nous avons voulu, en plus des manifestations pacifiques auxquelles l’UFDG continuera de prendre part, transporter notre combat contre le troisième mandat dans les urnes, parce que nous sommes déterminés à user de tous les moyens légaux pour empêcher Alpha Condé de s’octroyer une présidence à vie.
Est-ce que vous êtes prêts à refuser le vol de notre victoire dont Alpha Condé est coutumier ?
J’accepte votre mandat en espérant aussi que le dialogue politique inter-guinéen annoncé par la CEDEAO se tiendra et examinera de manière objective les revendications de l’Opposition politique, conformément à notre droit national et au Protocole additionnel de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance.
mRappelons que ces revendications, déjà soumises à la délégation conjointe de la CEDEAO, de l’UA et des NU lors des deux réunions préparatoires de ce dialogue, concernent notamment :
1- L’annulation du double scrutin du 22 mars ;
2- L’audit et l’assainissement du Fichier électoral ;
3- L’achèvement des élections locales du 4 février 2018 par l’installation des Conseils de
quartier et de district ainsi que des huit Conseils régionaux ;
4- L’ouverture du processus électoral aux partenaires traditionnels de la Guinée dans
l’organisation des élections, notamment l’UE, l’OIF et les NU ;
5- L’envoi d’une mission tripartite (CEDEAO, UA, NU) pour faire le bilan des violences
policières lors des manifestations du FNDC contre le troisième mandat.
Dans tous les cas, nous serons là, dans les urnes, dans la rue, sans tanks ni fusils mitrailleurs, sans faux bulletins pour bourrer les urnes et nous ferons face à toute volonté de confiscation de nos suffrages et pour imposer la vérité des urnes. Nous avons une seule arme, la plus grande de toutes : le peuple. Et le peuple gagne toujours. Je serais devant la pointe de l’épée, le fer de lance, la poudre du canon. Nous ne déserterons pas ! Je ne déserterais pas ! Dans ce champ de bataille, je ne fléchirais pas. Le vol a assez duré. Le mensonge a suffisamment fait du mal. Il est temps que nous soyons l’immense tempête salvatrice qui souffle définitivement ce monde délinquant et déliquescent.